Skip to navigationSkip to content

15 juin 2021

Le lac Hertel, un laboratoire inestimable pour les chercheurs

Depuis quelques années, le lac Hertel est régulièrement affecté par la prolifération de cyanobactéries — aussi appelées algues bleu-vert. Les chercheurs ne comprennent cependant pas pourquoi. En effet, la croissance des cyanobactéries est généralement stimulée par un excès de nutriments, venant par exemple des eaux usées ou du ruissellement agricole. Toutefois, aucune de ces sources de nutriments n’alimente le lac Hertel. La situation pourrait aussi être due à l’augmentation des températures et des concentrations de CO2 ou encore au nombre d’oies qui se nourrissent dans les champs alentour et rejettent leurs fientes riches en nutriments dans le lac. Tous ces facteurs peuvent interagir en donnant lieu à des conséquences inattendues sur l’écosystème.

Pour comprendre comment ces différents effets et interactions touchent le phytoplancton et le zooplancton du lac Hertel, les chercheurs utilisent un quai flottant muni de plusieurs unités expérimentales appelées « mésocosmes ». Chaque mésocosme est un baril contenant plusieurs centaines de litres d’eau du lac, qu’on peut utiliser de toutes les façons souhaitées aux fins de la recherche.

En général, les gens ont une bonne idée des réseaux trophiques (réseaux de chaines alimentaires) sur la terre ferme. Par exemple, les arbres sont les producteurs primaires qui convertissent la lumière du soleil en biomasse. Une partie de cette biomasse est mangée par les rongeurs, qui sont chassés par les renards, les coyotes ou les oiseaux de proie. Dans un lac, cependant, les producteurs primaires ne sont pas les arbres, mais un groupe de microorganismes appelé phytoplancton. Celui-ci nourrit le zooplancton — de petits animaux minuscules dont seul le plus gros peut être vu à l’œil nu —, qui lui est mangé par les petits poissons et les alevins. Les gros poissons et les poissons plus âgés tendent à se nourrir d’insectes ou de petits poissons.

Les cyanobactéries, communément appelées les algues bleu-vert, sont une des espèces de phytoplancton à croissance lente, normalement présentes dans le lac. Au cours de l’été, elles peuvent toutefois devenir dominantes, ce qui cause des problèmes pour le reste de l’écosystème. Tout comme la vieille écorce qui est immangeable par les rongeurs, plusieurs espèces de cyanobactéries forment de longs filaments que le zooplancton ne peut pas manger. Certaines espèces produisent des toxines pouvant empoisonner l’eau. Elles peuvent aussi flotter sur la colonne d’eau en remplissant de gaz des organites spéciaux, bloquant la lumière du soleil nécessaire à la croissance des autres espèces de phytoplancton.

Les chercheurs utilisent donc les mésocosmes pour comprendre comment les effets et interactions touchent le phytoplancton et le zooplancton du lac Hertel. Dans les publications scientifiques, les recherches rendent compte en détail de la modification du pH, des températures, des concentrations de nutriments ou de CO2, et de diverses combinaisons de ces modifications. Des étudiants du premier cycle ont également procédé à des expériences non publiées où ils retiraient le zooplancton ou encore ajoutaient, par exemple, des excréments d’oie et des mégots de cigarette. Les mésocosmes sont assez petits pour que ces traitements n’aient pas d’incidence sur le lac lorsqu’on y rejette l’eau — et pour permettre une réplication suffisante aux fins de l’analyse statistique —, mais assez grands pour étudier le phytoplancton et le zooplancton dans un milieu qui ressemble beaucoup plus à leur environnement naturel que dans un laboratoire. En comprenant les processus et les facteurs qui influent sur les réseaux trophiques du lac Hertel, nous pouvons améliorer nos connaissances non seulement sur ce qui se produit dans ce lac, mais aussi sur le comportement possible de lacs semblables dans un contexte de changements climatiques. Le lac Hertel est ainsi un laboratoire inestimable pour les chercheurs, et nous voulons le garder aussi intact que possible pour pouvoir continuer d’y puiser des connaissances.

Egor Katkov
Étudiant au doctorat et chercheur travaillant sur les mésocosmes
Département de biologie, Université McGill

loading...

Infolettre

Abonnez-vous à l'infolettre

Suivez-nous au gré du vent sur...
loading...